Bon, d'avance je préviens, c'est un peu méchant ce que je vais écrire. Je préfère préciser d'entrée que j'ai un profond respect pour ces gens qui s'investissent gratuitement pour aider, et sauver, ceux qui adhèrent carrément à l'assistance des personnes en danger, ces gens qui sont secouristes.
Plusieurs organismes, la protection civile, la croix rouge, St John's ambulance, etc, etc. Donc, profond respect, mais...
Me voilà, initialement volontaire et maintenant réquisitionné, pour participer aux tâches administratives de la campagne de vaccination contre la Grippe A H1N1. Rien de bien sorcier, quelques papiers à distribuer, un pseudo contrôle d'identité, et quelques étiquettes à coller... Fastoche! Dans le centre, un chef débordé, des infirmières, deux médecins, et cinq ou six administratifs comme moi (quelle honte de se faire appeler administratif quand on appartient à un corps de métier technique!).
Et cette fois, en plus des personnels classiques, un homme réquisitionné d'une association "humanitaire". Je crois que même sans sa veste polaire beige et rouge j'aurais deviné qu'il était secouriste... Enrobé, même bien enrobé, une cinquantaine d'années (ou peut être moins, mais...), un bas de survêtement (aucune classe), une tête ronde, des tous petits yeux, une toute petite bouche, une moustache (biensûr), la peau un peu mate, les cheveux en brosse. Le gars plein d'assurance dont la mission est de sauver le monde. Ce mec est secouriste. Et là, avant même d'avoir parlé avec, je me suis dit: "celui là... ça doit être un gros lourd!"
Sa mission ce jour là, appeler les gens par un numéro que je leur avait préalablement attribué, pour la consultation auprès du médecin. Très organisé, il sort un une feuille, mets ses lunettes, sort un stylo (celui qui doit lui servir pour faire les mots croisés quand il s'arrête pour piqueniquer en bord de route, vous savez ces gens qui sortent et qui se posent au bord de la route tout le dimanche après midi), et commence à noter des numéros de 1 à 230 en colonnes.
Les portes s'ouvrent, c'est la cohue. Les gens sont pressés et ont peur de devoir attendre. De fait, ils ont attendu... J'attribue les numéros, les dix premières minutes, j'avais à chaque instant cinq ou six bons de vaccination devant moi... Un vrai bordel...
Premiers passages devant le médecin... Mon ami secouriste remarque que j'ai fait une erreur... Deux 23... Le drame. Il me le fait remarquer. Je m'excuse, explique que je suis un peu crevé et que face à la cohue, l'erreur était humaine.
Moment d'acalmie, il ouvre la conversation. J'ai pas envie de lui parler, j'écoute et réponds les bien connus "oui, oui" d'indifférence. Et le voilà à me raconter qu'en tant que secouriste il est mobilisable et réquisitionnable 24/7. Admiratif un peu devant cet altruisme, je me dit quand même... Mais quel blaireau! A l'écouter, on se serait cru dans un camp de réfugiés somaliens à traiter des patients atteints par le virus Ebola...
Nouvelle vague, nouvelle erreur... Nouvelle remarque. Sur un ton gentil mais plus ironique que taquin. Ca commence à m'ennerver. Je profite d'un léger calme pour aller fumer. A mon retour il est en plein discours dans la salle d'attente. D'après lui, seuls 6% de la population Française a suivi une formation aux premiers secours. Ce qui est faible, il faut bien le reconnaitre. J'appartiens à ces 6%. Au cours de toutes les formations reçues, j'ai remarqué un truc: les secouristes, les vrais, pas les débiles comme moi qui ne passent que l'AFPS (attestation de formation aux premiers secours) ont en commun ce truc bizarre. A les écouter, ils sont là pour sauver le monde et prennent tellement à coeur leur mission, qu'ils en deviennent presque ridicules, voire répugnants. Je ne sais pas comment l'expliquer... Leur rigueur est impressionnante et sans faille, c'est vrai. Mais je ressens en eux cette frustration de ne pas être médecin ou infirmier. Les airs qu'ils adoptent, la conviction et l'implication personnelle qu'ils mettent en oeuvre lors des formations est absolument abyssale, et je reconnais être assez admiratif de ces gens qui peuvent autant donner sans rien attendre en retour... Mais c'est trop, il y a un moment où c'est ridicule! Tous ceux que j'ai vu délaissent beaux vétements pour des fringues de pouilleux, arborent fièrement les gilets fluos sur les sièges de leur bagnole, ont à chaque instant tous les acronymes mnémotechniques du secourisme en stock pour les utiliser... Je suis méchant, je le reconnais, mais c'est un sentiment partagé...
C'est beau! Mais vraiment pas enviable à mon avis...
Bref, vaccination grippe A, troisième supposée erreur de ma part. La salle d'attente est pleine, mon ami me le refait remarquer ironiquement et suffisamment fort pour qu'une salle d'attente pleine d'une quarantaine de personnes entende... Ca me gonfle, et je lui dis discrètement que l'erreur ne vient pas forcément de moi et que certains font des allers et venues vers l'exterieur pendant leur longue (très longue attente). Il semble d'accord avec moi. Et se met à siffler un air d'André Rieux... Quelle classe!
L'heure du départ approche, tant mieux, j'en ai ras le bol, je veux rentrer chez moi., je suis pressé. La chef de centre débordée mais souriante vient me voir pour me demander le nombre d'entrées que nous avons eu. Je lui dis. Et là... et là... mon gros se tourne et lui dit que j'ai fait plein d'erreurs!!! Au moins 5 ou 6...
Le brave altruiste sauveur du monde est un gamin de six ans qui cafte un truc insignifiant qui n'a en rien boulversé le déroulement des opérations! Elle me regarde avec un air de "qu'est ce qu'il nous fait chier celui là", sourire complice. Je prends mon manteau et rentre chez moi.
Reconnaissant de leur action, admiratif de leur engagement, je remercie les secouristes pour les actions qu'ils mènent. Si seulement ils pouvaient redescendre un peu sur Terre, ça serait vraiment des gens parfaits!
Plusieurs organismes, la protection civile, la croix rouge, St John's ambulance, etc, etc. Donc, profond respect, mais...
Me voilà, initialement volontaire et maintenant réquisitionné, pour participer aux tâches administratives de la campagne de vaccination contre la Grippe A H1N1. Rien de bien sorcier, quelques papiers à distribuer, un pseudo contrôle d'identité, et quelques étiquettes à coller... Fastoche! Dans le centre, un chef débordé, des infirmières, deux médecins, et cinq ou six administratifs comme moi (quelle honte de se faire appeler administratif quand on appartient à un corps de métier technique!).
Et cette fois, en plus des personnels classiques, un homme réquisitionné d'une association "humanitaire". Je crois que même sans sa veste polaire beige et rouge j'aurais deviné qu'il était secouriste... Enrobé, même bien enrobé, une cinquantaine d'années (ou peut être moins, mais...), un bas de survêtement (aucune classe), une tête ronde, des tous petits yeux, une toute petite bouche, une moustache (biensûr), la peau un peu mate, les cheveux en brosse. Le gars plein d'assurance dont la mission est de sauver le monde. Ce mec est secouriste. Et là, avant même d'avoir parlé avec, je me suis dit: "celui là... ça doit être un gros lourd!"
Sa mission ce jour là, appeler les gens par un numéro que je leur avait préalablement attribué, pour la consultation auprès du médecin. Très organisé, il sort un une feuille, mets ses lunettes, sort un stylo (celui qui doit lui servir pour faire les mots croisés quand il s'arrête pour piqueniquer en bord de route, vous savez ces gens qui sortent et qui se posent au bord de la route tout le dimanche après midi), et commence à noter des numéros de 1 à 230 en colonnes.
Les portes s'ouvrent, c'est la cohue. Les gens sont pressés et ont peur de devoir attendre. De fait, ils ont attendu... J'attribue les numéros, les dix premières minutes, j'avais à chaque instant cinq ou six bons de vaccination devant moi... Un vrai bordel...
Premiers passages devant le médecin... Mon ami secouriste remarque que j'ai fait une erreur... Deux 23... Le drame. Il me le fait remarquer. Je m'excuse, explique que je suis un peu crevé et que face à la cohue, l'erreur était humaine.
Moment d'acalmie, il ouvre la conversation. J'ai pas envie de lui parler, j'écoute et réponds les bien connus "oui, oui" d'indifférence. Et le voilà à me raconter qu'en tant que secouriste il est mobilisable et réquisitionnable 24/7. Admiratif un peu devant cet altruisme, je me dit quand même... Mais quel blaireau! A l'écouter, on se serait cru dans un camp de réfugiés somaliens à traiter des patients atteints par le virus Ebola...
Nouvelle vague, nouvelle erreur... Nouvelle remarque. Sur un ton gentil mais plus ironique que taquin. Ca commence à m'ennerver. Je profite d'un léger calme pour aller fumer. A mon retour il est en plein discours dans la salle d'attente. D'après lui, seuls 6% de la population Française a suivi une formation aux premiers secours. Ce qui est faible, il faut bien le reconnaitre. J'appartiens à ces 6%. Au cours de toutes les formations reçues, j'ai remarqué un truc: les secouristes, les vrais, pas les débiles comme moi qui ne passent que l'AFPS (attestation de formation aux premiers secours) ont en commun ce truc bizarre. A les écouter, ils sont là pour sauver le monde et prennent tellement à coeur leur mission, qu'ils en deviennent presque ridicules, voire répugnants. Je ne sais pas comment l'expliquer... Leur rigueur est impressionnante et sans faille, c'est vrai. Mais je ressens en eux cette frustration de ne pas être médecin ou infirmier. Les airs qu'ils adoptent, la conviction et l'implication personnelle qu'ils mettent en oeuvre lors des formations est absolument abyssale, et je reconnais être assez admiratif de ces gens qui peuvent autant donner sans rien attendre en retour... Mais c'est trop, il y a un moment où c'est ridicule! Tous ceux que j'ai vu délaissent beaux vétements pour des fringues de pouilleux, arborent fièrement les gilets fluos sur les sièges de leur bagnole, ont à chaque instant tous les acronymes mnémotechniques du secourisme en stock pour les utiliser... Je suis méchant, je le reconnais, mais c'est un sentiment partagé...
C'est beau! Mais vraiment pas enviable à mon avis...
Bref, vaccination grippe A, troisième supposée erreur de ma part. La salle d'attente est pleine, mon ami me le refait remarquer ironiquement et suffisamment fort pour qu'une salle d'attente pleine d'une quarantaine de personnes entende... Ca me gonfle, et je lui dis discrètement que l'erreur ne vient pas forcément de moi et que certains font des allers et venues vers l'exterieur pendant leur longue (très longue attente). Il semble d'accord avec moi. Et se met à siffler un air d'André Rieux... Quelle classe!
L'heure du départ approche, tant mieux, j'en ai ras le bol, je veux rentrer chez moi., je suis pressé. La chef de centre débordée mais souriante vient me voir pour me demander le nombre d'entrées que nous avons eu. Je lui dis. Et là... et là... mon gros se tourne et lui dit que j'ai fait plein d'erreurs!!! Au moins 5 ou 6...
Le brave altruiste sauveur du monde est un gamin de six ans qui cafte un truc insignifiant qui n'a en rien boulversé le déroulement des opérations! Elle me regarde avec un air de "qu'est ce qu'il nous fait chier celui là", sourire complice. Je prends mon manteau et rentre chez moi.
Reconnaissant de leur action, admiratif de leur engagement, je remercie les secouristes pour les actions qu'ils mènent. Si seulement ils pouvaient redescendre un peu sur Terre, ça serait vraiment des gens parfaits!
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